top of page
Rechercher

C'est prouvé scientifiquement: le stress a un impact sur notre comportement alimentaire


Les explications des mécanismes à l'oeuvre par Célia Mores Docteur en Neurosciences


Il est connu que, le stress chronique et répété, engendre une souffrance psychologique, qui se traduit par un sentiment d’angoisse et d’impuissance… un mal être, une anxiété… Et une montée de pensées négatives…

Lorsque notre organisme ne peut plus « faire face » au stress, on parle de trouble de l’adaptation. Cela, peut aller jusqu’à provoquer des « burn-out », des dépressions et autres pathologies organiques….

Ce trouble de l’adaptation va affecter certains de nos comportements, notamment ceux liés à notre comportement alimentaire ; engendrant ainsi des troubles comme les compulsions, les hyperphagies boulimiques, les hyperphagies nocturnes, les addictions à l’alimentation…. Troubles qui eux-même vont non seulement provoquer une prise de poids mais aussi l’apparition de maladies métaboliques (comme par exemple le diabète).

Au niveau physiologique, l’état de stress, provoqué par une « situation stressante », va activer l’axe hypothalomo-hypophisaire-corticosurrénalien, ce qui se traduit par la libération de CRF par l’hypothalamus, d’ACTH par l’hypophyse et de cortisol par les glandes surrénales.

Au niveau du comportement alimentaire, le stress va agir à plusieurs niveaux et de différentes manière en modifiant l’activité des neurones impliqués dans la prise alimentaire.

Stress et sérotonine

Suite à un stress, il va y avoir libération de cortisol afin de permettre à l’organisme d’y faire face et donc de s’adapter. Cette libération de cortisol va augmenter l’activité des neurones sérotoninergiques. Ainsi, il va y avoir libération massive de sérotonine par ces neurones, « les vidant » de leur contenu ; ce qui va avoir pour conséquence une baisse importante de sérotonine. Or, la sérotonine est un neurotransmetteur impliqué dans les humeurs dépressives mais aussi le comportement alimentaire. Les anti-dépresseurs utilisés actuellement (ex : Prozac© , Séropram©,…), massivement, pour lutter contre la dépression sont des IRSS, c’est à dire des Inhibiteurs Sélectifs de la Recapture de la Sérotonine, dont le rôle est justement de prolonger l’action de la sérotonine. Certains, comme le Prozac©, ont même été utilisés chez les boulimiques nerveuses pour lutter contre les crises d’hyperphagies. En effet, plus le taux de sérotonine est « haut », plus la prise alimentaire diminue. C’est ce qui explique, qu’il y’a quelques années, des « amphétamines-like » ont pu être données aux patients atteints d’obésité, afin d’augmenter artificiellement la libération de sérotonine.

Cette libération massive de sérotonine va créer, au niveau cérébral, une déplétion en sérotonine ; les individus vont devoir mettre en place un plan d’action pour y remédier. Pour le dire plus brutalement, il vont devoir « passer à l’attaque » pour produire de nouveau de la sérotonine.

La sérotonine est synthétisée à partir d’un acide aminé essentiel, le tryptophane, qui est apporté par l’alimentation. Ils vont devoir consommer des aliments riches en tryptophane pour faire remonter leur taux de sérotonine (sans essence une voiture ne démarre pas). On trouve du tryptophane dans divers aliments comme le blanc de poulet, le blanc de dinde, le saumon, la sardine, les œufs, les artichauts, les asperges, les prunes, les avocats……Apres ingestion, ces aliments seront dégradés en acides aminés, mais concernant le tryptophane, cela n’est pas « aussi simple » que cela. En effet, afin qu’il passe la barrière hémato-encéhalique et qu’il puisse synthétiser de la sérotonine, il faut qu’il y ait une consommation de « sucres ». Plus précisément, il faut qu’il y ait sécrétion d’insuline. C’est pour cette raison que, suite à un stress, la consommation d’aliments riches en carbohydrates et « pauvres » en protéines augmentent.

Cette consommation accrue d’aliments riches en carbohydrates serait du au fait que la libération de sérotonine augmente l’adaptation au stress, permettant donc de mieux gérer ce dernier et de lutter contre l’anxiété (la sérotonine diminuant l’anxiété). C’est, cet état de fait qui explique, en partie, que certains individus deviennent « obèses » à l’adolescence. L’anxiété de passer du primaire au collège, c’est à dire à la « grande école » engendre une anxiété qui est gérée par l’augmentation de la consommation de produits riches en sucres. C’est aussi, ce qui explique qu’en situation de stress intense, d’état dépressif, nous avons tendance à nous « jeter » sur les sucreries.

Le problème est que les produits consommés sont généralement trop riches en sucres ou consommés de manière trop importante ce qui engendre des prises de poids plus ou moins importantes.

Et comme dans certains cas, ces prises de poids provoquent des états dépressifs…..


Stress et régulation physiologique de la prise alimentaire

Le rôle des hormones du stress sur les hormones et neuropeptides impliqués dans le comportement alimentaire et leurs conséquences sont connues depuis de nombreuses années ; cela date, en effet, des années 80.

Le rôle du stress sur l’individu est bien entendu différent d’un individu à l’autre ; du moins sur la plan comportemental. Certains d’entre vous, chers lecteurs, allez me dire « moi il me coupe l’appétit » ; d’autres, au contraire, « je mange plus »…

Pour ma part, dans cette partie de l’article, je vais m’attarder sur les conséquences physiologiques de la libération des hormones du stress sur les hormones / neuropeptides impliqués dans la prise alimentaire.

Ce qui fait que nous « cédons » aux tentations est, aussi, dû à notre cortex préfrontal, qui, est en charge de nos prises de décisions.

L’impact du stress sur la prise alimentaire est différent selon la phase dans laquelle on se situe.

Pendant le stress lui même ou « juste avant », un effet anorexigène du stress est observé. En effet, au cours de ces deux phases il y a libération de CRF par l’hypothalamus. Or le CRF est anorexigène. L’appétit est donc « couper ». Qui parmi vous, la veille, le matin avant un entretien, un examen n’a pas eu l’appétit coupé ?

Et bien maintenant vous avez l’explication physiologique.

En revanche, en phase de récupération, un effet oréxigène du stress a été observé. En effet, la libération de CRF par l’hypothalamus induit celle d’ACTH par l’hypophyse qui va induire celle du cortisol par les glandes surrénales. Le cortisol est oréxigène. L’appétit va augmenter, par conséquent la prise alimentaire. Cette augmentation va engendrer, chez certains individus, des crises d’hyperphagies et donc des prises de poids. Cet état de fait, est d’autant plus important, si les crises sont récurrentes, en raison d’une incapacité des individus à « gérer leur stress » et à faire redescendre leur taux de cortisol à la normale.

Le cortisol va, d’une part, agir sur le métabolisme en augmentant la gluconeogénèse et la lipolyse induisant ainsi des crises hyperphagies et un gain de poids conséquent.

D’autre part, il va agir sur la libération des hormones, des neuropeptides impliqués dans la prise alimentaire comme, le NPY (augmentation de la prise alimentaire = action orexigène) et la leptine (diminution de la prise alimentaire = action anorexigène), en augmentant l’effet de l’un et diminuant l’effet de l’autre.

Les individus qui ont une réaction physiologique au stress « plus accrue », sont ceux qui vont avoir le plus tendance à consommer des produits riches en graisses et en sucres. Rares sont ceux qui se jettent sur des brocolis ou haricots verts vapeurs…

Il est impératif de noter, car cela est très important pour toutes les personnes en situation de stress que le fait de compenser par de l’alimentation « palatable » n’est pas « seulement psychologique » (nourriture doudou) mais aussi dû à l’action physiologique du cortisol sur les molécules impliquées dans notre comportement alimentaire.


Stress et Night-Eating Syndrome (NES)

Il existe un trouble du comportement alimentaire dont on parle de plus en plus et qui a fait son entrée dans le DSM-V (publié en 2013 aux USA, et 2015 en France) dans la catégorie « troupes du comportement alimentaire » ; jusque alors il n’étais pas répertorié. Or ce trouble est connu depuis de nombreuse années, une publication scientifique date même de 1955.

C’est le Night-Eating Syndrome (NES) ou hyperphagie nocturne (en français), la prévalence dans la population générale serait environ de 1,5 % et environ de 8 % chez les individus atteints d’obésité. Comme l’hyperphagie diurne, ce type d’hyperphagie peut aussi conduire à une obésité.

Dans ce type de pathologie les individus se réveillent la nuit en raison d’une sensation de faim. Ils mangent enormément au cours de la nuit puisque au moins 25 % de l’apport énergétique de la journée est consommé après le repas du soir ! Ces individus ne prennent généralement pas de petit-déjeuner car ils n’ont pas (« plus ») faim. Ils ne peuvent évidemment pas s’en empêcher (mal-être si ils ne mangent pas). Pour être diagnostiqué, le trouble doit être présent de manière récurrente et depuis plus de trois mois.

Les individus atteints de NES sont généralement des personnes dites « stressées », plus exactement des personnes vulnérables au stress.

Chez ces patients, un lien fort existe entre le « stress », le taux de cortisol et leur comportement d’hyperphagie nocturne. Et même de dépression, puisque un lien a été établi entre NES et dépression. Au cours de la journée (période diurne), Ils ont une humeur plus dépressive que les individus ne souffrant pas de ce syndrome.

Chez les individus atteints de NES, Il a été observé un taux de cortisol significativement plus élevé au cours de la journée que chez ceux qui ne sont pas atteint du syndrome ; notamment en situation de stress. Ce qui rend compliqué la perte de poids souhaitée par ces patients. De plus, une diminution du taux de mélatonine nocturne (hormone du sommeil, sécrétée à partir de sérotonine) a été mise en évidence.


En conclusion

Si le stress impacte le comportement alimentaire, nous verrons dans un prochain article que le comportement alimentaire va impacter la réponse physiologique au stress, rendant ainsi certains types de patients plus vulnérables au stress…

Et pour contrôler les comportements alimentaires compulsifs ou les « mauvais choix » (faut-il encore définir « mauvais choix » : Pour qui ? Pour quoi ?) alimentaires, rien de tel que de savoir bien gérer son stress

Par des séances de sophrologie, de cohérence cardiaque… qui permettent non pas de ne plus consommer des produits riches en graisses et en sucres mais de les consommer en tout état de cause, et non de manière automatique et compulsive.

La consommation sera un choix et non subie.


Célia Mores, Dr en Neurosciences




bottom of page